Lettre Zola n°14 - mars 2025 « François-Henri Désérable a été élève au lycée La Providence, à Amiens. Comme Emmanuel Macron. Fin novembre 2024, l’écrivain se rend à Santiago, coup du hasard, le président de la République s’y trouve aussi, pour une visite diplomatique. La capitale chilienne devient le cadre d’une rencontre, discrète et absurde..»
On m’avait dit tu vas voir, quand il te serre la main il te la serre fort, et longtemps, il ne la lâche plus et ne te lâche pas du regard, et c’est exactement ce qu’il s’est passé, je lui ai tendu la main, et il me l’a serrée fort, et longtemps, il ne la lâchait plus et ne me lâchait pas du regard. Il avait la main douce, je me suis demandé ce
qu’il mettait comme crème hydratante, quelque chose, j’ai pensé, avec des huiles végétales et du beurre de karité, et il me serrait la main comme si c’était précisément pour cela qu’il était venu jusqu’ici, en Amérique du Sud, pas pour serrer la main du président Milei à Buenos Aires, pas pour serrer la main du président Lula à Rio de Janeiro, pas pour serrer la main du président Boric à Santiago du Chili, non, pour serrer la mienne, de main, rien que la mienne, et il m’a souri comme si nous étions des amis de longue date, comme s’il avait traversé l’Atlantique, fait 11 642 kilomètres et quatorze heures d’avion pour me voir, et que certes il en avait profité pour rendre visite à Milei en Argentine et Lula au Brésil et Boric au Chili, parce que ça faisait partie du job, des emmerdements auxquels il ne pouvait pas se soustraire, mais que, en réalité, c’était pour moi qu’il était là, rien que pour moi. Il m’a souri, en somme, d’un sourire qui m’a fait regretter d’avoir voté NFP.
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